ÇáãÔÇÑßÉ ÇáÃÕáíÉ ßÊÈÊ ÈæÇÓØÉ ÇáÌÒÇÆÑíÉ 2010
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le 16 juillet 2008, en début d’après-midi, je me décide enfin à quitter mon domicile de marchienne-au-pont pour entamer la longue marche qui devrait, je l’espère alors, me mener à bethléem si possible le 24 décembre. Vous savez déjà tous que ce ne fut pas possible puisque je vous ai déjà raconté que je quittais chypre la nuit de la saint sylvestre.
La route, au départ, je la sais longue mais elle ne me fait pas tellement peur car j’ai déjà usé quatre fois me bottines sur le chemin de compostelle. Et au total, je ne suis pas loin d’avoir parcouru une telle distance.
Ma première expérience, je l’ai longuement décrite sur ce site dans la rubrique bavardages, parlons d’autre chose, ultreia.
Depuis lors, je suis retourné trois fois sur le chemin mais sans plus parcourir toute la distance en une fois.
La première fois, je me suis arrêté du côté de poitiers avec l’idée de poursuivre l’année suivante. Mais ayant échangé du courrier avec jacques, le jardinier original dont je parle souvent dans le récit du premier trajet, nous décidons de faire l’été suivant la voie du nord de l’espagne, celle qui longe la côte.
Je ne suis pas parti de poitiers mais de bordeaux car je ne serais pas arrivé à temps au rendez-vous que nous avions fixé à hendaye à la frontière franco-espagnole.
Après deux ou trois jours de marche, je ne me souviens plus, le chiot de jacques était exténué.
L’idée de l’emmener était saugrenue car le chemin du nord est beaucoup plus esquintant que le camino frances et cela, presque tout le monde le sait. Apparemment, le vétérinaire lyonnais ne le savait pas puisqu’il rassurait jacques en prétendant que vénus pouvait parcourir bien plus. Mais la pauvre jeune bête qui n’avait même pas un an, courait en début de journée bien loin puis revenait pour repartir et revenir. Elle semblait toute heureuse, mais faisait trois fois notre trajet sans se rendre compte de la longueur du chemin que nous voulions parcourir chaque jour. Et après quelques heures de ce régime, elle n’en pouvait plus. Elle se couchait et semblait s’endormir aussitôt.
Jacques qui portait un sac ridiculement lourd d’environ 25 kilos est crevé également. Il a embarqué 5 kilos des croquettes préférées de sa vénus, une pelle pliante pour enterrer ses cacas, et un tas d’objets probablement inutiles mais pesants. Il abandonne et prend un taxi jusqu’à la frontière, puis un train pour rentrer à lyon avec sa vénus. Les chiens sont interdits dans les trains espagnols. Je me demande comment il serait rentré s’il avait poursuivi jusqu’à compostelle.
Je marche donc seul, et fort déçu de me retrouver seul. Le nombre de pélerins sur cette voie est des plus réduits. Je n’en ai rencontré que deux jusqu’à bilbao où je me rends compte de la perte de ma carte d’identité. Je me sens contraint d’abandonner également parce que sans ce document, je pense compliqué de louer une chambre d’hôtel et sur la voie du nord, il n’y a pas beaucoup de gîtes pour pélerins.
Allons, on remettra cela probablement l’an prochain.
Et effectivement, l’année suivante, me revoici sur le chemin de compostelle en partant de charleroi. Arrivé à reims, je me rends compte que mon pantalon est tâché de sang. Je sentais bien une douleur vive que je pensais provenir d’une gerçure provoquée par la couture du caleçon. Mais c’est plus qu’une gerçure, c’est une petite entaille sur cinq centimètres. J’ai rendez-vous dans deux semaines au puy-en-velay avec jacques et un de ses confrères que je ne connais pas. Il me semble sage de rentrer et d’attendre la guérison pour repartir.
Je prends donc une série de trains pour revenir à charleroi sans passer par paris mais si je me souviens bien par maubeuge et jumet. Et presque deux semaines plus tard, je prends le train pour lyon suivi d’un autre quelques minutes plus tard vers le puy-en-velay.
Jacques est au rendez-vous le lendemain matin mais sans son confrère avec lequel il s’est disputé. Par contre, vénus est de nouveau de la partie. On a décidé de s’arrêter à la frontière espagnole de sorte qu’il n’y aura pas de problème d’interdit dans les trains. Vénus a appris à rester aux pieds de son maître et semble nettement plus solide.
Jacques me semble dépressif. Il me signale qu’il en a plein le dos de son boulot à lyon et qu’il va essayer de se faire engager en cours de route comme forestier quelque part sur le chemin de compostelle. Il vendra son appartement et s’achètera une bicoque sur le camino.
Après quelques jours, je suis parvenu également à me disputer avec jacques pour une raison assez futile mais après une accumulation de circonstances énervantes.
Je savais déjà que je ne ferais jamais un gîte pour pélerins avec lui depuis qu’il m’a dit qu’il fallait trouver une baraque avec un grand terrain parce qu’il envisageait de faire pousser de la marijuana au milieu d’autres plantes pour sa consommation personnelle.
A chaque pause, il se roule une cigarette sans oublier d’y ajouter de quoi lui faire oublier ses soucis, ce qui le rend souvent hagard.
Lui qui se choquait de l’impudicité de certains pélerins qui, en espagne, se déshabillaient dans le couloir des douches, voilà qu’à la sortie d’un village, à 50 mètres des fenêtres de la dernière maison, il se déshabille et plonge nu dans la rivière. Je suis estomaqué d’un tel changement. Le surlendemain, nous rencontrons des suisses et lors de la pause de midi au bord d’une rivière, il remet cela. Un des suisses suggère de faire comme lui. Je signale que je n’en ai pas envie en prétextant que j’ai cinq compeeds aux pieds, ce qui est d’ailleurs vrai. Ils vont faire trempette, puis sortent de l’eau. Ils s’essuient et un canasson blanc traverse la rivière et vient marcher sur le tas de vêtements. Avec ses sabots, il écrase l’appareil photographique numérique d’un des suisses. L’écran numérique est en miette. Impossible de dire si l’appareil de 350 euros est complètement fichu. Le soir, à l’auberge, peut-être pour se consoler, le suisse au numérique pété va fumer moult joints en compagnie de jacques. Le lendemain matin, les deux asticots sont incapables de se réveiller et ont la gueule de bois.
Quelques jours plus tard, lors d’un arrêt dans un restaurant-pâtisserie et que je m’apprétais à manger un superbe quartier de tarte aux fruits des bois, jacques sort son paquet de tabac, se roule une cigarette et je lui demande d’attendre que je finisse ma tarte avant de l’allumer. Il se fiche en boule, me traite d’égoïste et d’éternel rouspéteur et allume sa cigarette au tabac particulièrement puant. Moi, je réplique qu’il est bien impoli et que si je suis si désagréable et s’il le désire, on peut poursuivre séparément. Il approuve immédiatement. Je termine mon morceau, je paie et m’en vais seul.
Je ne l’ai revu qu’une fois deux jours plus tard. Il m’a dépassé sans me dire un mot. Je n’ai pas réagi. Seule vénus s’est arrêtée un moment, mais il l’a vite rappelée.
J’ai poursuivi ce splendide chemin assez éreintant pendant environ trois semaines jusqu’à saint-jean-pied de port où j’ai bifurqué vers la côte basque que j’ai suivie à mon aise jusqu’à bordeaux car j’y avais le train du retour réservé depuis avant mon départ de belgique.
J’ai donc une certaine expérience des longues marches. Et maintenant que j’ai 66 ans et aucune contrainte de calendrier à respecter, j’ai envie de changer d’horizon. Quelle destination choisir ? Au cours de chaque trajet sur le camino, tout le monde se pose la même question. Et la prochaine fois ? Souvent, la réponse est soit une autre voie vers compostelle soit rome ou plus rarement jérusalem mais sans trop y croire, surtout par faute de temps.
Le choix de jérusalem s’est imposé au printemps suivant sans beaucoup réfléchir probablement parce que j’ai lu les récits de deux marcheurs qui s’y sont rendus.
Ma motivation est extrêmement floue. Je n’ai aucun objectif précis (sauf celui de mon nikon). Je n’ai pas l’intention ni l’ambition comme les croisés de délivrer la ville de jérusalem de toute présence non chrétienne et je ne crois pas que mes efforts puissent modifier quoi que ce soit pour l’humanité comme certains pélerins peuvent parfois sérieusement et honnêtement se l’imaginer. Est-ce vraiment un pélerinage ou seulement un gigantesque trekking touristique ? Cela m’importe peu et je n’essaie pas d’y répondre.
Contrairement à mes habitudes lors des pérégrinations "compostelliennes" (o.d.s.7 ?), j’ai décidé de me nourrir quotidiennement dans les restaurants et je désire loger à l’hôtel chaque fois que la météo serait menaçante et chaque fois que j’atteindrais une grande ville à une heure tardive, à moins d’y tomber sur un camping. Le budget en sera d’autant plus lourd mais je me vois mal aller mendier l’hospitalité dans les cures et monastères pourtant assez nombreux sur ma route. Et tant pis si je loupe ainsi des visites et des rencontres probablement fort intéressantes et enrichissantes.
Encore une fois, je n’emmène aucune carte routière avec moi. Je les ai consultées avant le départ et sais donc plus ou moins par où me diriger. Au besoin, je peux en acheter en cours de route et probablement moins cher qu’en belgique.
Je consulte internet et y découvre des caddies aux prix époustouflants : 263 euros pour un superbe modèle danois et si je me souviens bien plus de 500 euros pour un extraordinaire modèle suisse. En consultant le catalogue du magasin colruyt, je suis tombé sur un caddie de grand luxe aux pneus gonflables et probablement très solide qu’ils proposent à 99 euros, dix fois le prix des plus moches aux roues pleines qu’on vend dans les solderies. Mais mon choix me semble plus raisonnable que les propositions "internetiennes" (o.d.s. 7 ?). Je l’achète.
Je me paie sur e-bay une tente légère de la marque campingaz que je vais chercher à la louvière.
Je m’offre aussi des objectifs optiques pour mon nikon et me tape la hollande pour acquérir un mini ordinateur hp. Mais je ne les emporterai finalement pas pour réduire le poids de ce que je dois trimbaler. Enfin si, je les emporterai mais après trois kilomètres, je téléphonerai à des amis pour venir alléger ce que je transporte et que je n’imaginais pas si pénible à tirer.
Et c’est devant le parking de la gare de charleroi qu’en triple vitesse, je me suis débarrassé de ce qui me semblait peu utile. Dans la précipitation, j’ai probablement laissé le mini hp sur le trottoir.
Oui, pour le poids, cela allait nettement mieux. Mais faute du moindre entraînement, je me sentais fourbu déjà à châtelet.
En traversant châtelineau, un passant me demande où je pars comme cela. J’ai la bétise de répondre jérusalem. Il me répond : Attention, van gogh, c’est de l’autre côté ! Pour les lecteurs qui ne sont pas du coin, van gogh est l’hôpital psychiâtrique de la région.
Sa remarque était succulente et m’a fait rire mais désormais, si on m’interroge, je désignerai seulement la ville suivante.
A la sortie de châtelet, au bas d’une côte, en face d’un dispensaire, je plante ma tente derrière un monticule de terre apportée pour un chantier et passe ma première nuit de pseudo-croisé.
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